Quand Alcarin se posa à quelques pas du temple, ce fut dans un silence et une légèreté sensibles. C’était le seul et unique endroit du royaume des dragonniers qu’ils fréquentaient régulièrement. Et ils y venaient toujours dans le plus profond respect et attachement, eux-seuls en connaissant les raisons et ne tenant pas vraiment à les ébruiter. Ainsi, ils essayaient toujours de passer lorsqu’il n’y avait personne. C’était vraiment un endroit particulier pour eux, et cela se reflétait surtout nettement dans l’attitude de Samsara. Calme, ne dansant pas, ne fredonnant pas, le pas solennel, le regard baissé dans une douce tristesse et les yeux éclatant de tranquillité : quiconque la connaîtrait de la reconnaîtrait pas. Raison de plus qui faisait qu’ils venaient lorsqu’il n’y avait personne. Elle ne tenait pas à ce que trente-six questions lui tombent dessus. En fait, c’était une personne plutôt secrète et mystérieuse malgré les apparences.. Et les gens ne s’en rendaient jamais compte. Pourtant, c’était des personnes trop claires en apparence qu’il fallait se méfier et non de ceux qui montraient d’embler leur allure secrete. Oui, c’était cela. Alcarin termina sa réflexion là-dessus tandis qu’il voyait sa maîtresse s’engouffrait dans le temple. Quant à lui, il s’allongea sur le sol, posant tranquillement sa tête sur ses pattes de devant.

De son côté, déambulant plus que ne marchant, l’attitude de Samsara oscillait entre trop de solennel et un côté rêveur. Sûrement un mélange du au fait que cet endroit était important pour elle et qu’en même temps, il déchaînait un flot de pensées et de souvenirs dans sa mémoire. Ce fut d’un air perdu qu’elle finit par arriver au cœur du temple de Gushnak. Le Grand Dragon… Elle ne se réveilla qu’à partir de là. Sinon, jusqu’ici, elle avait à peine fait attention au paysage. Car, ce n’était pas tant le temps en lui-même qui lui importait mais plutôt sa fonction symbolique envers le Dieu des dragonniers. Alors, s’approchant de l’hôtel, la jeune femme se laissa brusquement tomber à terre, ses genoux venant tomber lourdement contre le sol sans qu’elle ne montre pour autant signe de douleurs. Devant elle s’étalait un large demi-cercle un peu surélevé, la partie droite venant se coller au mur de pierre, et plus loin, la statue de représentation en hommage à Gushnak. Levant son visage vers lui, ses yeux scintillèrent mais aucune larme n’en perla. Son regard reflétait d’un même coup une tristesse et un bonheur. Mêlés, ses deux émotions lui un aspect étrange. Entre dévotion et désespoir, on aurait pu se poser plein de questions à la voir. Mais elle était seule. Rien ne résonnait autour d’elle jusqu’à ce que de faibles paroles sortant de sa bouche ne vienne rompre ce silence.

-Aidez-nous.. Par pitié…

Sa tête retombant sur sa poitrine, Samsara resta quelques secondes immobiles jusqu’à ce qu’enfin, un mouvement n’apparaisse sur ces joues. Des larmes translucides coulaient, passant sur ses pommettes rosées avant de descendre vers le reste de ses joues et de se perdre dans la descende de son cou tendre. Ses yeux toujours ouverts avaient semblait-il perdu leur bonheur précédemment vu pour ne désormais plus montrer qu’une fatigue profonde. Jamais pourtant elle n’apparaissait fatiguée, ni triste, ni lasse. Ce lieu était un peu celui où tombent les masques pour elle. Son masque. Alors, sans préavis, sans crier garde ni rien, son corps s’affaissa brusquement sur le sol. Dans un mouvement qui parut plutôt lent, Samsara s’écroula à terre. D’accord ses hanches, puis sa taille, enfin sa poitrine, ses épaules, son visage. La jeune femme s’était effondrée sur le côté. Les bras ballant devant elle, les jambes à moitié repliées, ses yeux toujours ouverts mais ne pleurant plus, Samsara aurait pu passer pour morte. Ses paupières ne clignaient même pas, sa respiration était à peine perceptible. Figée, elle ne bougea plus.

Dehors, Alcarin ne s’était pas endormi. Il patientait que sa maîtresse revienne. Il n’était jamais rentré avec elle dans le temple (pourtant il y avait la place, que serait un temple honorant un dragon des dragonniers si un dragon ne pouvait même pas y entrer ?) mais il savait, ou plutôt pressentait, ce qui pouvait s’y passer. Samsara y restait en plus toujours un long moment. Il la savait triste mais son attitude extérieure ne reflétait que le calme, ni l’inquiétude, ni la tristesse. C’était un peu comme… quelque chose de normale, par lequel on passerait comme on passerait une étape importante de la vie. Cependant, quand il aperçut au loin (c’est que leur vision porte loin) un des siens, un dragon, s’approcher de leur position, il releva la tête d’un air agité. Apparemment il en avait un humain sauté. Un autre dragonnier venait par ici ? A voir. S’il venait au temple, il risquait de déranger Samsara.. Mais bon, il n’allait pas faire la guerre à un humain juste pour ne pas qu’il entre dans le temple. Il le laisserait faire ce qu’il voulait. Reposant donc sa tête sur ses pattes, mais cette fois les yeux alertes, il observait de loin l’humain qui s’était relevé de sa délicieuse chute.

D’abord Samsara ne réagit pas. Non. Ce n’était pas du tout comme si quelqu’un venait de se placer juste devant elle. Son regard ne sembla pas le voir car ses yeux restaient figés dans exactement la même position que précédemment. On aurait vraiment pu la croire morte… Ses larmes n’étaient désormais plus que de minces filées humides ayant laissé une trace salée sur ses joues. Toutefois ses yeux paraissaient encore et toujours embués, lumineux, fixe. Ils se mirent pourtant à bouger avec une lenteur considérable, les pupilles de ses yeux glissant délicatement et silencieusement vers le visage du nouveau venu. Mise à part cela, strictement rien d’autres n’avaient bougé.. Vu comme ça, ça pouvait facilement mettre la frousse à plus d’un cœur fragile. Mais finalement après quelques secondes, les paupières clignèrent et sans crier garde, la jeune femme se redressa brusquement manquant sûrement de faire tomber à la renverse l’étranger. Désormais assise en tailleur, ses genoux touchant presque le sol dénotant sa souplesse, elle sourit brièvement. D’ordinaire elle aurait offert un sourire éclatant à une rencontre mais.. là, une légère gêne que quelqu’un l’est vu ainsi s’était imposée à son visage. Toutefois, il en fallait bien plus pour la déstabiliser. D’un clignement de paupières elle reprit son attitude traditionnelle.

-Faites comme bon vous semble, déclara-t-elle sur le même ton que celui qu’il avait pris en s’adressant à elle.

Bien évidemment, elle se doutait bien qu’il s’était adressé à elle en lui disant cela mais.. c’était sa façon d’avoir de la répartie. Et c’était une douce répartie, Samsara n’était jamais désagréable avec les gens. Quoique… C’était faux. Elle était juste toujours de bonne humeur et gaie, mais il ne fallait pas non plus la chercher. Or, si elle était toujours souriante, elle n’était pas stupide et avait nettement discerné son petit sourire en coin, souvent signe de sarcasme ou de moquerie. Mais elle n’en avait cure en fait. Se relevant tranquillement comme si de rien n’était, toute trace de tristesse ou de désespoir avaient disparu de son visage, même sur ses joues il semblait que jamais des larmes n’y avaient perlé. Son visage accueillant et joyeux était revenu, et son timbre entrainant et doux s’exprimait à nouveau dans sa voix lorsqu’elle reprit la parole :

-Je me reposais juste. Et je ne vois pas énormément en quoi cela vous regarde, termina-t-elle d’un ton qui n’était pas le moins du monde agressif car il déclamait juste une douceur et une indifférence qui se réfléchissait dans ses prunelles. Mêlées, cela faisait assez étrange.

C’était la vérité simple, elle n’y venait jamais pour prier. C’était complexe. Alors se reculant d’un pas, la jeune femme jeta juste un dernier bref regard au jeune homme qui l’avait embêté et s’arrêta subitement. Jusqu’ici, elle ne l’avait pas spécialement regardé avec précision, son esprit encore dans les brumes de son précédent état. Il devait être un peu plus vieux. Humain, certainement dragonnier. Et un pauvre sourire à la fois timide et triste se glissa une brève seconde sur les lèvres de la jeune femme quand elle ne put s’empêcher de penser qu’il était plutôt mignon. Alors, comme prenant un instant de plus pour le graver dans sa pensée, Samsara mit un temps d’arrêt dans sa rotation avant d’entièrement se détourner. Ses jambes ayant effectués ce mouvement avec élégance et souplesse, ils reflétaient déjà les premiers pas de danse qui furent le prélude de la suite de sa démarche, dansante et légère, tandis qu’elle s’éloignait pour regagner la sortie. Quelle étrange jeune femme devait-elle faire ? Folle, pour les autres sûrement. Différente, pour ceux qui la connaissaient.

Aucun bruit ne semblait venir de dehors. Déjà l’étranger rencontré plus haut n’avait plus grande place dans son esprit. C’était autre chose qui préoccupée Samsara pour l’instant. Mais pourtant, alors qu’elle allait quitter le temple, elle se retourna brièvement pour lui adresser un signe de la main suivie d’un sourire comme pour lui dire au revoir. Ce dernier n’avait pas été bien grand mais représentait toujours très bien ses manières rayonnantes. Ses yeux s’inclinant vers le sol, une brève lueur désolée passant dans son regard, ce que – généralement – personne n’apercevait, elle se détourna à nouveau pour partir.

La clarté de la neige, la lumière blanche s’y reflétant, éclatant, Samsara en aurait été presque éblouie lorsqu’elle se retrouva aux portes de l’extérieur, au seuil du temple. Ses pupilles s’élargissant brusquement, ses yeux faisant exactement le même mouvement, son regard aurait pu refléter une intense surprise qu’il aurait été le même. Alors que ses premiers pas se faisaient dans la froide neige, Alcarin se releva immédiatement pour venir à sa rencontre. Marchant pieds nues comme toujours, il ne voulait pas qu’elle est beaucoup de chemin à faire. S’ébrouant pour chasser la neige qui l’avait un peu recouvert, il en profita pour inspecter sa maitresse. Elle était comme avant, enfin, comme d’habitude. Cette dernière lui sourit d’un air joyeux, déjà prête à s’en voler à nouveau. Peut-être allait-il enfin pourvoir quitter ce royaume ? Grimpant avec agilité sur son dragon, Samsara se calla tranquillement façon amazone. La dragonnière n’avait pas de selle, se mettant toujours dans des positions extraordinaires rendant le précédent objet bien inutile. Cette fois elle s’allongea tranquillement sur le côté, un regard vers le sol tandis que son dragon s’élevait. Traçant sa route comme il voulait, la jeune femme eut tout à loisir de penser.

Son esprit s’égara sur cette étrange rencontre au temple. Elle avait rarement été dérangée dans ses précédentes visites. Elle s’arrangeait toujours pour que ce soit des moments où personne ne venait. Et là… cet étranger… Passant sur le dos, calant ses bras sous sa nuque et repliant ses jambes contre elle, ses yeux y repensèrent. Son image était toujours très nette dans son esprit malgré le peu de temps où elle y avait en réalité fait attention. Mais au final, il n’était qu’un passant de plus dans son existence. Pourquoi s’y attarder ? Si elle aimait faire attention aux gens quand ils étaient présents, elle préférait se retirer à bien d’autre réflexion quand elle était seule. Aussi, chassa-t-elle l’inconnu de son esprit pour essayer de se concentrer sur autre chose. Seulement… une diable d’idée lui vint : composer une musique sur ce qui s’était passé. Irrésistible. Samsara ne sut dire pourquoi, mais là, elle était vraiment inspirée. Attrapant sa flûte traversière dans un des deux sacs qui pendaient de chaque côté du dragon, elle changea de position. S’asseyant, une jambe croisée sous elle, l’autre tombant contre le flan d’Alcarin, elle glissa la flûte à ses lèvres pour commencer sa composition tandis que ses yeux se fermaient pour mieux se concentrer sur les sons.

Mais brusquement un mouvement d’Alcarin se fit terrible. La secouant si brutalement, la jeune femme se tourna vers sa tête pour voir ce qui se passait mais pour toute réponse, il ne fit que lui désigner le temple. Qu’y avait-il ? Samsara avait beau être observatrice, elle n’avait pas non plus une vision de dragon. Même en plissant les yeux, toujours rien. Pourtant Alcarin s’excitait toujours autant. Et cela… cela agaçait un peu la jeune femme. Elle ne souriait plus. Sa joie pouvait être remplacée par de l’inquiétude quand des situations où elle ne comprenait pas ce qu’il se passait arrivait. Et c’était bien le cas. Et à côté, Alcarin qui s’agitait toujours autant.

-C'est ta nouvelle méthode pour me faire passer un message Al' ? Tu sais.. tu pourrais aussi bien me montrer que je crois que cela me causera moins de bleus !

Impérieuse, le dragon ne se le fit pas dire deux fois. Plus parce qu’il attendait simplement son ordre plutôt qu’à cause de son ton. Il en faudrait plus pour qu’il puisse croire qu’un jour l’autorité puisse faire parti du caractère de sa dragonnière… Retournant ainsi vers le temple, cette dernière put enfin voir ce qu’Alcarin avait perçu bien plus nettement : des pilleurs de temple. Non, c’était une blague ? Le jour où elle venait en pèlerinage – si on put dire ça – il fallait en plus que des pilleurs de tombes viennent. Alcarin l’avait-il ramené juste pour qu’elle défende ce temple ? Certes en soit c’était louable mais… elle ne comptait pas non plus perdre la vie juste pour un temple. Peu importe le temple, seul compte le symbole qu’il représente. Le temple en ruine qu’elle y serait toujours venue. Mais il y avait autre chose… Les pilleurs de tombes n’étaient pas peu nombreux, et… il y avait quelqu’un dans le temple. Oh ! c’était pour ça. Alors, comprenant enfin la situation, le calme et la joie de Samsara revinrent sans plus tarder sur son visage. Prenant un petit air mutin si adorable et plissant les yeux d’une légère moquerie, elle s’adressa d’un clignement d’œil à son dragon.


-Depuis quand te soucis-tu de la vie d’un dragonnier au point de faire demi-tour ? Ou alors aurait-il était accompagné d’une charmante dragonne ? Allez, c’est bien pour toi, hein, termina-t-elle dans un éclat de rire tendre. Allons-y – dans un dernier souffle inquiet au souvenir de l’inconnu.

Encore que cela se disait-il – dragonne – elle n’en avait aucune idée. Facilité était beau parfois. Alcarin lui donna un petit coup en s’ébrouant mais ce n’était pas le temps de faire tomber sa cavalière. Plongeant en piquet vers le temple – pas trop non plus – Samsara se jeta du haut de son dragon avec souplesse une fois qu’il ne sut plus qu’à deux ou trois mètres d’altitude. Son agilité et la neige souple lui permirent une réception parfaite tandis que sans perdre une seconde, elle se rua dans le temple. Son esprit calculait alors combien de brigands avaient elles vues dehors, peut-être une douzaine ? un peu plus. Aucune idée. Mais il fallait être plus qu’un brigand de grand chemin pour vouloir s’en prendre au temple du Dieu des dragonniers. Ils seraient ici rapidement, mieux valait ne pas s’attarder. Dehors, Alcarin devait sûrement surveiller tout cela de haut. Pourvu qu’il ne lui arrive rien, ne put-elle s’empêcher de penser. Plus vite serait-elle repartie, mieux ce serait. Ainsi, à peine eut-elle franchi le seuil du temple qu’elle s’écrira de sa voix éclatante mais aux échos pressants :


-Venez, il ne faut pas rester là !

Mais ses yeux se posèrent sur l’intérieur du temple, et ne virent rien. Personne. Ses yeux s’effrayèrent et son sang se glaça tandis que son visage alarmé se tourna vers l’extérieur d’où elle entendait déjà les pilleurs venir. Un sourire maladroit de sa propre sottise ajouté à pauvre éclat lumineux vint sur ses lèvres. Cela s’annonçait bien.

Quel fut le beau rouge qui empourpra les joues de la dragonnière quand l’inconnu, venant de surgir devant elle, lui adressa ce sourire effronté et les paroles qui allaient avec. Ça avait un côté.. charmant. Samsara n’en avait pas spécialement l’habitude, mais même si elle ne put se retenir de rougir, cela ne gâta pas le moins du monde sa joie naturelle qui ainsi pu accueillir son nouvel arrivant par une moue d’une joie amusée. Elle ne se fana même pas lorsqu’elle aperçut la petite troupe qui poursuivait le dragonnier, ou plutôt entraperçu, car il l’avait déjà attrapé pour l’emmener derrière lui. Elle avait à peine le temps de réfléchir qu’ils avaient déjà rejoins l’extérieur du Temple. Mais que faisait tout ce monde ici ? Ce n’est que lorsqu’elle entendit vaguement crier un nom par un des brigand derrière eux – celui de ‘Leon’ – qu’elle se demanda si ce n’était pas justement le prénom de l’inconnu et si alors toutes ces personnes étaient là pour lui ? Intéressant, il avait du sacrément se mettre du monde à dos là…

-Hé bien, sont-ils tous là pour vous ? demanda finalement Samsara, un peu essoufflée, lorsqu’ils s’arrêtèrent brièvement au bord de la falaise qui bordait le temps.

Son temps entre ironie, douceur et bonne humeur sonnait pareille au chant d’une amie agaçante. En même temps, Samsara était du genre assez sociable et qui plus est, à ne pas fuir les gens en leur compagnie. Et il fallait dire au fond que la situation lui paraissait assez drôle s’ils étaient effectivement tous là pour lui. Elle n’était pas vraiment affolée, va savoir pourquoi. Sûrement du à son tempérament tout simplement. Et c’était sûrement aussi du au côté relâché qu’arborer le dragonnier, ses dernières paroles sur un ton déridé par rapport aux effectifs qui lui courraient derrière. La jeune femme prit quand même le temps de vérifier qu’il n’était pas amoché. D’un coup de regard elle le balaya et constata qu’il allait bien, ce qui est en soi, pouvait ne pas durer si cela continuait comme ça. Alors levant les yeux, elle aperçut deux dragons : Al’ et sûrement le propre dragon de l’inconnu. Fallait-il essayer de les rejoindre, c’était à mon avis l’idée de son compagnon de fortune. Cependant.. Samsara ne vit instantanément pas les choses de la même manière. Mais il fallait faire vite. Ainsi se stoppant rigidement, et stoppant de la même manière le dragonnier qui la tenait, elle se dégagea et se fut à elle d’attraper son poigné avant de lui dire :

-Venez ! Ils sont trop près pour que nous rejoignions nos dragons !

Sans autre explication, la jeune femme – en quelques pas astucieux de danse – se détourna du bord de la falaise pour le longer rapidement sur environ quatre mètres, les rapprochant dangereusement du côté de l’entrée du Temple et des adversaires qui en sortaient justement à cet instant. Alors les flèches sifflèrent à nouveau, et les auraient probablement touchés – vu le peu de distance à laquelle ils se trouvaient – si Samsara ne s’était brusquement pas jetée en avant, sur la pente de la falaise, entraînant le jeune inconnu derrière elle. Malheureusement, dans la rapidité de son action et la maltraitance de leur réception sur la pente, elle fut obligée de lâcher sa main. La pente, neigeuse, était diablement raide, et la descente ne fut pas lente. Ils furent rapidement entraînée, sans moyen de s’arrêter – car il n’y avait ni pierre, ni plante – sur la pente glissante de la falaise qui devant eux semblait subitement s’arrêter pour projeter ces victimes dans le vide, et les envoyer s’écraser des dizaines de mètres plus bas. Toutefois, Samsara restait calme. Ses yeux reflétaient leur habituel rire. Et même, dans la glissade, levant elle les bras sans réprimer plusieurs vagues d’éclats de rire. A son avis, l’autre dragonnier ne devait pas autant rire que cela… après tout, voir sa mort approché. Mais cela ne viendrait jamais, assurément, ou du moins, pas pour l’instant.

En effet, là où la pente semblait s’arrêter pour ne laisser que le vide était en fait une cavité qui avait été creusé dans celle-ci pour accueillir un chemin dissimulé qui faisait en parti le tour du Temple. Samsara qui avait passé pas mal de temps au Temple l’avait un jour découvert par hasard. Il n’était pas très visible, même à vol de dragon. Car la cavité qui représentait la seule fois ouverte du chemin était assez petite. Ainsi pourrait-on ainsi dire que le chemin avait été creusé comme une crevasse, et l'assombrissant ainsi car ne permettant qu'à peu de lumière d'y pénétrer. Et l’atterrissage n’y était pas spécialement indolore… Là sur son sol, la neige avait gelée et il y restait très peu de poudreuse. Ainsi quand Samsara disparut brusquement dans le trou, son éclat de rire cessa au moment de percuter le sol. Aucun son de douleur ne s’échappa de sa gorge, ni même aucun signe sur son visage ou son corps, mais pourtant, elle était bien mal tombée. Touchant terre sur le côté, sa tête avait rudement cognée la glace et son épaule s’était démise. Basculant sur le dos un instant, elle se retourna ensuite sur le côté pour voir l’état du pauvre inconnu qu’elle avait entraîné avec elle. Il fallait espérer qu’il soit assez robuste..

-Vous n’avez rien ? Au moins, vous avez échapper à votre mort certaine, termina-t-elle dans un éclat de rire, dévoilant un beau sourire rayonnant.

Oui. Il fallait l’espérer car ce n’était pas tout de suite qu’ils allaient trouver des médecins. Alcarin connaissait bien les tactiques de Samsara en cas de trop grande affluence et ici, s’il avait à peu près bien tout compris, il avait du en faire par à l’autre dragonne et lui convier de s’éloigner le temps que les choses se calment. C’était la meilleure chose à faire avec tout ce monde qui semblait les rechercher (lui en fait, lui – pas elle, ne l’oublions pas. Alors, la jeune femme se releva souplement, sans prendre garde à ses blessures, pourtant l’état de son épaule se voyait fichtrement bien.

-Il vaut mieux se faire oublier le temps que tout ce monde se lasse de vous chercher. Est-ce que vous pouvez marcher ?

En effet, ils n’étaient pas tout à fait arrivé à leur destination. Dans le cas où les brigands les retrouvaient, Samsara préférait avoir au moins un petit appui stratégique. Et dans le cas contraire, cela ferait toujours une belle vue.

Bon au moins, il allait bien. Une chance. Même si elle avait parfaitement su ce qu’elle faisait, des risques de blessures, ça existait toujours. Oh elle l’aurait soigné s’il y avait eu besoin. Elle ne pensait pas qu’il aurait pu se faire si mal que ça mais bon.. quand même. Pas non plus qu’elle s’en sentait responsable mais voilà.. quoi. Passant rapidement à autre chose, elle sursauta brièvement quand il lui fi remarquer qu’elle était blessée : elle l’avait presque oublié !

-Oh ça, déclara-t-elle d’un ton joyeux en tournant son visage vers son épaule.

Et d’un rien – toujours aussi joyeuse – elle remit brutalement son épaule en place, sans la moindre cérémonie, sans précaution et sans que son visage ne porte toujours la moindre trace de douleurs. Cela devait être assez incompréhensible pour le pauvre jeune homme.. mais cela faisait si longtemps pour Samsara qu’elle ne prenait plus la peine de s’expliquer auprès des autres désormais. En plus, elle était heureusement du caractère de cet étranger.. Elle s’attristait au fond quand du chagrin, de la douleur ou autre sentiment négatif s’emparait des gens. Mais lui, il prenait les choses avec ce même ton léger que l’aurait fait Samsara.. Bon, c’était différent car la demoiselle abordé plus de joie et plus de… désinvolture. Mais bon, cela revenait au même. Et c’est ainsi que se relevant et d’une joie encore plus renouvelé, elle lui répondit.

-Je m’appelle Samsara Moroy. Et vous c’est Leon, c’est ça ? J’ai cru entendre votre nom prononcé entre deux traits de flèches, répliqua-t-elle d’un ton entre rire et amusement. Vous avez de charmants amis.

Une chance qu’elle n’est rien contre les difficultés ou autre source d’embêtement. Elle était toujours à tout prendre à la légère la demoiselle mais.. ce n’était qu’une façon d’apparaître, au fond, elle agissait toujours avec autant de responsabilité et de froideur qu’une personne normale, voire plus. Et d’ailleurs, en attendant, il valait mieux quand même ne pas s’attarder ici, au cas où. Peut-être les gars précédents allaient-ils les suivre, et dans ces cas-là, il leur faudrait un meilleur refuge, ou au moins avec un meilleur point stratégique. Et heureusement, cet étape faisait largement parti de son plan initial. Alors, s’avançant vers la jeune homme qui lui faisait face en lui adressant le plus grand et charmant de ses sourires, elle lui tendit la main à nouveau.

-Allez, venez. Courage, on n’y est presque, déclara-t-elle comme s’il avait été question depuis le début d’une quelconque destination.

Attendant qu’il la suive, Samsara se mit à avancer dans cet étroit chemin, au plafond qu’on aurait dit la hauteur presque aussi petite que le peu de largeur que leur offrait cette route. Il fallait se baisser quelque peu pour y circuler, tant que Samsara posait ses mains sur le plafond pour éviter de se prendre quelque chose dans la tête – ce qui n’était pas si facile avec l’étroit ouverture de la crevasse. On avançait précautionneusement et lentement. Elle ne savait pas qui avait construit ce passage mais… elle se demandait bien à quoi il pouvait servir à l’origine en tout cas.

Enfin, ils arrivèrent en vu d’un endroit dégagé, où le soleil rentrait pleinement comme si le passage s’ouvrait sur l’air libre. Et c’était effectivement le cas. Débouchant à l’air libre et sur un chaud soleil rassurant, Samsara respira un bon coup avant de se retourner vers Leon.

-Alors qu’est-ce que vous en dites ? demanda-t-elle en lui désignant la vue.

C’était un magnifique paysage qui s’offrait à eux. Ils étaient à une belle hauteur que toutes les plantes, et vallons et creux dans les montagnes s’offraient à eux dans cette guirlande de neige et de verdure, sur lequel le chatoyant soleil allait posé ses rayons pour illuminer le tout. Un véritable paysage de rêve. Samsara le contempla de longues secondes, un tendre sourire sur ses lèvres d’un petit air rêveur, tandis que le même soleil venait s’étaler sur sa peau. On serait bien resté longtemps comme ça… Mais il était temps de bouger. Alors, se retournant, la demoiselle se retrouva face à la paroi. Et quelle paroi je vous le demande : c’était une des faces extérieures du temple. Et le but : monter jusqu’en haut. Oh, cela n’allait pas être aussi dure que ça, Samsara savait qu’il y avait plein de prises un peu partout. Elle l’avait déjà escaladée plein de fois sans problèmes.

-Je vous en prie, finit-elle pas dire à Leon tout en lui indiquant la paroi, d'un merveilleux sourire entre politesse et malice sur les lèvres.

Une fois en haut, ils seraient au sommet du temple. Quel meilleur endroit pour être à l’abri des ennemis, avoir une bonne position stratégique et profiter de l’environnement ?